Publié le 21/08/2020 - LA DEEPECHE
l'essentiel Bertrand Vigouroux (B. V.) est sommelier, Laetitia Corcelle (L.C.) dirige l’ensemble la Sportelle. Le 25 août, dans le cadre du festival de Rocamadour, ils seront réunis dans les chais du Château de Mercuès. Les "Dégustatations croisées" permettront au public d’associer leurs sens en associant chaque motet à un vin et à un met du chef étoilé Julien Poisot.
Pourquoi cette alliance entre la musique, le vin et la gastronomie ?
L. C. : C’est une dégustation croisée. On va déguster des vins mais aussi de la musique. La dégustation de vin est un moment très particulier où tout le monde est d’accord pour rentrer dans cette confrontation spéciale sur ce que l’on ressent à l’intérieur. Notre envie était de proposer ce même exercice sur la dégustation de la musique.
B. V. : La Maison Vigouroux s’inscrit dans un territoire et nous souhaitons soutenir toutes les actions qui ont pour but de grandir l’image de notre département. La consommation de vin est devenue plus culturelle qu’alimentaire. On avait pour idée de complexifier la dégustation avec un accord plus complexe que celui vin/met. C’est un accord qui nécessite un lieu, mais aussi du son pour titiller les sens et les émotions.
À force de titiller tous ses sens, ne risque-t-on pas de passer à côté de certains ?
B. V. : On peut perdre un certain nombre de nos clients dans une complexité trop élevée, mais je n’y crois pas. L’ensemble des amateurs de vin sont en recherche d’excellence. En matière de musique, comme de vin, les compositeurs qui ressortent sont ceux qui ont travaillé la question de l’excellence et donc de la complexité. C’est nécessaire pour bien comprendre les sens et les émotions de la dégustation.
L. C. : On a construit la soirée avec des contrastes. Cela renouvelle les sens à chaque fois. Nous avons aussi fait en sorte de doser le plus justement possible.
Comment accorder la bouche à l’oreille (et inversement) ?
L. C. : On a choisi des musiques qui vont avec les vins, cinq Malbec très différents. L’histoire des vins, les types de parcelles, ce que l’on ressent sur l’attaque du vin, sur sa longueur ou dans sa texture, son épaisseur et ses arômes… tout cela a guidé mes choix musicaux. Cela donne un patchwork de musiques assez contrasté. On aura de la musique du XIXe, du XXe et du XXIe siècles avec par exemple des compositeurs contemporains comme Christopher Gibert ou Ola Gjeilo. Pour des vins qui ont une approche plus classique, plus lyrique, il y aura des pièces de Gounod et de Rossini. Et on aura aussi de la musique romantique allemande avec Bruckner et Brahms.
B. V. : Il y a un vocabulaire qui est parallèle entre une dégustation et une musique. On peut parler d’un vin gras, ce qui évoque des sons plutôt graves. Au contraire, on associera plutôt les notes aiguës à un vin plus acide. Et puis, il y a un rythme en dégustation. C’est le tempo en musique, mais c’est aussi la densité du vin.
Ne craignez-vous pas qu’une soirée "prestige" de la sorte ne s’adresse qu’à un public averti ?
B. V. : Non, c’est surtout pour des gens ouverts à de nouvelles expériences, avec des sujets qui sont certes d’un bon niveau mais qui sont accessibles.
L. C. : Il y aura une dimension pédagogique et une dimension émotionnelle et ça, ce n’est pas une question de culture. Dans notre société, le mot élitisme me pose problème. L’élitisme c’est considérer que les choses de très bonne qualité ne seraient pas pour tout le monde. C’est faux ! Évidemment, c’est une soirée dans un château, avec des artistes et des très grands vins. Mais c’est le même tarif que des places de grands concerts de variété ou de matchs de sport. Et puis, aujourd’hui, le contact est réduit par la force des choses. Ce type de soirée trouve une façon renouvelée de proposer du contact.
Un concert au château de la Treyne
Les soirées insolites du festival de Rocamadour commenceront dès samedi. La première soirée se déroulera dans les jardins du Châteaux de la Treyne. Les Musiciens du Louvre y joueront Nisi Dominus de Vivaldi. La soirée est axée sur le baroque. Entre le cadre et la musique, le public pourra s’imprégner de l’atmosphère du XVIIIesiècle.
Caroline Peyronel
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